samedi 30 mars 2013

LXXXII ~ De l'émotion, « De l'Allemagne » et de la nourriture.

Je commence cet article par une grande nouvelle vestimentaire : la robe qui m'a fait tomber dans le lolita il y a presque 12 ans maintenant (durant cette fameuse époque où j'écrivais « EGL » dans de petits cœurs sur mes feuilles de cours…) va bientôt être mienne.

Photo trouvée sur fuckyeah oldschool lolita. Je pense que le headress assorti va devenir ma nouvelle quête ultime.
Voilà, j'ai eu quelques larmes aux yeux en repensant à la fillette qui voyait cette robe comme un idéal inatteignable, et dont j'ai maintenant réalisé l'un des rêves. Je n'ose imaginer comme je vais pleurnicher quand je la toucherai pour de bon.

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Sinon, hier soir, je suis allée au musée. Après l'exposition sur le romantisme noir et ma passion toute neuve pour l'œuvre de Caspar David Friedrich, la Fortune a décidé de me faire plaisir en mettant sous mes yeux l'affiche pour l'exposition De l'Allemagne, ou la peinture allemande de 1800 à 1939. Je ne peux que vous conseiller d'y aller, on y apprend plein de choses et l'angle choisi, très didactique, m'a bien plu. Le parcours en lui-même, tragique, part de la recherche de l'Idéal (début du romantisme, donc) pour arriver au dégoût et à la peur de la nature humaine (influence de la Première Guerre mondiale). Les premiers tableaux, inspirés de thèmes religieux, mythologiques (par la figure de la Vierge ou d'Apollon, soit beauté, sagesse, pureté d'âme, etc. etc.), ou encore historiques symbolisent une recherche spirituelle, une quête d'unité pour contrebalancer un certain marasme politique ; bref, l'espoir d'un monde meilleur… avant de chuter lamentablement à peine un siècle et demi plus tard dans l'enfer de la guerre, des couleurs sombres de l'angoisse et des figures monstrueuses des gueules cassées. On en sort plutôt remué.

Entre les deux, on a quelques pièces qui expriment ce regard neuf que l'artiste romantique portait sur la nature, cet ailleurs que l'on expliquait de mieux en mieux grâce aux progrès de la science, mais qui demeurait cette entité mystérieuse et intrigante pour l'homme civilisé. J'ai été ravie et assez émue de voir des manuscrits du Traité des couleurs de Goethe, qui contient certes de grosses erreurs scientifiques mais qui a pas mal marqué son temps (Schopenhauer y fait référence dans ses démonstrations par l'optique) et est donc un témoignage historico-scientifique précieux. On connaît trop peu Goethe l'homme de science, pour lui préférer le poète…
Mais bon, malgré l'admiration que je porte à Goethe, mon cœur a surtout été marqué pour les toiles de Friedrich qui étaient exposées. Elles sont sans conteste ce que j'ai préféré dans cette exposition, sans doute parce que mon amour pour les paysages et ses retranscriptions picturales ne fait que se renforcer au fur et à mesure que le temps avance.

Quelques morceaux choisis, dans l'ordre d'exposition (et encore une fois, courez-y !)

Johann Heinrich Wilhelm Tischbein, Goethe dans la campagne romaine
C.D.F., Temple de Junon à Agrigente
Ernst Ferdinand Oehme, Cathédrale la nuit
C.D.F., L'Arbre aux corbeaux (branches d'arbres, tout ça tout ça).
George Grosz, Polarity - Paysage Apocalyptique

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Sinon² (je narre ma vie dans le désordre, tant pis), j'ai vu Lempicka jeudi soir, et nous sommes allées manger tibétain (dans ce même restaurant où nous étions allés fêter l'anniversaire de l’Ohm). J'ai beaucoup apprécié ce moment, qui m'a bien changé les idées, merci encore Lempicka ! Cette fois-ci, j'ai pris des photos de mes plats.

Soupe aux œufs. La consistance est un peu déroutante, mais c'est bon !
Nouilles sautées aux légumes. C'était très copieux, j'en avais déjà mangé le tiers avant de penser à prendre la photo…

Et sinon3, juste parce que je suis en train d'y jouer et que je suis sous le charme de la bande-son.

mardi 26 mars 2013

LXXXVI ~ Otome in black

Ces derniers temps, je lorgne beaucoup vers un lolita plus clair, ou encore vers le cult-party, le hama, le « j'ai toujours rêvé être une œuvre de Mucha »… Mais au fur et à mesure que le temps passe, mon idéal vestimentaire se précise et prend la forme d'un otome assez sombre.

Otome, maiden, jeune fille, ce sont des termes qui se retrouvent déjà beaucoup dans le monde du lolita (le lolita n'est-il pas, quelque part, une certaine forme d'otome ?), mais si la silhouette lolita est stricte, l'otome permet beaucoup plus de créativité et de mélanges hasardeux. J'ai longtemps eu du mal à me représenter ce style, parce que je le trouvais très fourre-tout (sans doute parce que ce n'est pas un style, d'ailleurs); finalement c'est cet aspect-là qui m'attire de plus en plus, peut-être parce qu'il permet encore cette maladresse que je regrette dans les débuts du lolita – bien que je trouve qu'il a lui aussi tendance à s'aseptiser de plus en plus.

Street snap de l'un des tous premiers Kera Maniax. Cette jeune fille porte du Jane Marple et du Fairywish.




















L'otome permet de porter du court, du long, des couleurs vives et des couleurs claires, et se contrefiche d'une quelconque classification. Ce qui compte, c'est de composer un poème par ses vêtements, par leur tissu, leur forme, leurs thèmes. Il permet une certaine nostalgie sans renier sa modernité. Et l'on y porte des robes imprimées de biscuits avec des chaussures Union Flag.

Bien que je me voie plus porter la tenue de gauche, je trouve celle de droite très réussie.

Si je me retrouve dans beaucoup d'aspects du lolita, je regrette qu'il soit aussi cloisonné. L'EGL, c'est le mystère de la féminité, le sweet la part enfantine, le classical l'histoire revisitée… bien que cette classification en sous-genres lui ait également été profitable, chacun d'entre eux développant une atmosphère lui étant propre et enrichissant par là-même le mouvement général. L'otome permet des mélanges sympathiques qui cultivent nos paradoxes. Gravitant autour de marques emblématiques comme Emily Temple Cute ou encore Jane Marple, ces dernières sont loin d'être essentielles et il est possible de chercher de l'inspiration un peu partout.

Mélange pois/rayures/dentelle/biscuits
Les hoodies peuvent être mignons !

Malgré tout, je préfère toujours les teintes sombres, et je trouve le otome particulièrement frileux dès qu'il s'agit de faire preuve d'originalité avec le noir, comme si cette couleur était condamnée à garder en permanence cet aspect humble voire funèbre qui est le sien depuis des siècles – tout comme dans le lolita, ou certaines sweets vêtues de noir revendiquent le terme de bittersweet, comme si cette teinte suffisait en elle-même à séparer deux coordinations identiques mais de couleurs différentes. Et alors quoi, on appellera les tenues à dominante rose des tenues maxisweet ?


Sapphira Doll.
Je trouve les deux tenues ci-dessus absolument parfaites (et j'aimerais bien pouvoir les porter !), mais n'est-ce pas un peu dommage de se limiter à cet emploi du noir dans l'otome ? J'aimerais, à terme, mêler tout aussi bien otome et imagerie religieuse que otome et petits gâteux ou otome et fleurs, voire tout à la fois (et pourquoi pas ?), et ce principalement dans des teintes sombres. Je trouve formidable que l'on puisse avoir tant de possibilités pour s'exprimer à travers le vêtement, en mélangeant les genres, les coupes, les tissus, et exprimer ainsi sa féminité, sa nostalgie, sa naïveté, et mille autre petites choses qui nous caractérisent et que l'on apprécie de dévoiler en s'habillant.

Ceci... avec des croix... des fleurs... *perdue dans son délire*
Ah, je précise juste mes sources : les snaps proviennent de Tumblr, les coordinations Emikyu du blog de leur boutique de Kyoto,  et la dernière photo du site d'Innocent World.

vendredi 22 mars 2013

LXXXV ~ One day in a lolita life, 20 mars 2013.

C'était le thème du mois sur la communauté LJ française en janvier, et j'ai un peu regretté de ne pas m'y être collée car je le trouve amusant. Et là, semaine de vacances oblige, j'en ai profité pour prendre quelques photos. 

8 h 30 Généralement je me réveille alors que l’Ohm se prépare pour aller en cours. Parfois, je me rendors, mais la plupart du temps j'en profite pour me préparer à manger. Le petit déjeuner est le repas que je préfère dans la journée, du coup je les prépare souvent très copieux, sauf cas de réduction budgétaire drastique… comme c'est le cas en ce moment.

Trois tartines. Pleurez avec moi.
Au moins, j'ai ma gelée de groseilles (j'aime les groseilles) et un bon thé. En ce moment, hormis les chai de ma box, je bois beaucoup de Jardin Bleu de Dammann, aux fleurs de bleuet et d'hélianthe. Je mets un peu de musique, et je lis avec Dandy Bear à mon côté.

Pour la musique, aujourd'hui, c'est ça.


La Passion selon saint Matthieu, de Bach. Hier, c'était celle de saint Luc. Tous les paris sont ouverts pour demain.
Une fois que je juge avoir « suffisamment » lu, je m'habille succinctement et je fais un peu de ménage (le moment que je préfère dans ma journée, on s'en doute).

11 heures Je me douche, me crème, m'habille… souvent devant un film ou un épisode de série, d'anime. Aujourd'hui je regarde le 5épisode du drama japonais Honey and Clover. J'ai regardé les deux saisons de l'anime le mois dernier, et comme j'avais plutôt bien aimé, je m'attaque à la version live. j'aime beaucoup la façon dont est interprété le personnage de Hagu, mais ça s'arrête à peu près là. Je n'arrive pas à m'attacher aux autres personnages et puis sinon c'est… bruyant. Mais Hagu est jolie (ce qui suffit pour que je continue à regarder, en fait).
Parfois, on vient sonner à la porte pour apporter un colis (c'est important dans la vie d'une lolita, n'est-ce pas ?). Aujourd'hui, point de vêtements, mais du Sailor Moon !


C'est un pendentif et un bracelet qui étaient vendus avec un numéro de Nakayoshi dans les années 90 (mais je ne sais pas exactement quand), Nakayoshi étant le magazine dans lequel Sailor Moon était pré-publié. Le pendentif s'ouvre, et à l'intérieur on peut coller un des autocollants en forme de cœur qui sont livrés avec (celui de Sailor Moon était déjà à l'intérieur quand je l'ai reçu. Ce n'est pas ma sailor préférée mais je l'aime beaucoup quand même, donc ça me va !) Il est très rare de trouver le lot complet en vente, mais j'ai réussi à avoir celui-ci pour une bouchée de pain (sans doute parce que l'un des autocollants était déjà utilisé). Pour aujourd'hui, je suis une fan comblée ! Je ferai peut-être un message sur ma petite collection un jour, si ça intéresse quelqu'un.

Bref, voici ma tenue pour sortir (sans manteau) :

(Ignoble lumière... On dirait que mes collants sont fluorescents !)
Outfit rundown : Robe H&M enfants, serre-taille Clara Maeda, pull Emikyu, sac Frill,
le reste en vrac vient de AatP, Chantilly, encore H&M et plein d'autres endroits plus ou moins obscurs
(oui, j'ai mis mon collier sailor moon).
J'ai essayé de faire quelque chose d'un peu otome avec cette robe que j'ai achetée il y a peu. Elle est constellée de petits cœurs blancs sur fond noir, c'est mignon comme tout. J'aimerais bien m'amuser à faire une tenue d'esprit plus gothic avec cette robe, dans un esprit un peu H. Naoto,  mais bon, là j'ai voulu rester simple.

13 heures Je sors acheter du thé pour notre échange avec Shimi. J'en profite pour passer à la Fnac mais rien ne me tente. Je ne me sens pas très motivée pour sortir aujourd'hui, du coup ce n'est pas très passionnant à raconter…

15 heures De retour chez moi, je me prépare à nouveau un Jardin Bleu et je me précipite pour regarder la mise à jour Closet Child parce que j'avais oublié, ce matin, que nous étions mercredi (je suis une lolita étourdie). Heureusement, je n'ai rien raté d'intéressant. 
C'est le moment pour moi de jouer aux jeux vidéo, de traîner un peu sur Internet, de mettre à jour mon Pupe, de regarder les nouveautés des marques, et plein d'autres choses. En passant, léger coup de gueule sur Mary Magdalene, dont la dernière robe est taillée plus grande qu'à l'ordinaire sans possibilité de resserrer ou d'agrandir la taille de base. En gros, vous ne faites pas 75 cm de tour de taille pour 90 cm de tour de buste, vous l'avez dans l'os. Je n'ai absolument rien contre des tailles plus grandes pour les filles plus fortes que moi, au contraire, mais ce qui m'agace, c'est qu'il faut que ça se fasse au détriment des autres. Maintenant que le marché occidental devient de plus en plus intéressant pour les marques japonaises, ces dernières s'adaptent de plus en plus (aka agrandissent les mesures de leurs vêtements) en mettant de côté une clientèle plus fluette. Remplaçons un diktat par un autre, c'est bien plus intelligent… Bref. Je suis de mauvaise foi, mais ça m'attriste un peu.

La robe est très jolie, cela étant dit.

17 heures En feuilletant un GLB, j'ai l'idée d'une coordination avec ma longue robe J&J, donc je me mets à l'œuvre. 


Outfit rundown : Robe J&J, corset F+F, blouse et chaussures Moitié (merci Lempicka !), headresses AatP et offbrand.

Mes deux headresses.
J'ai acheté cette voilette lors de vacances à New-York, il y a 5 ans, le jour même de mon retour à Paris. Je l'avais repérée la veille, mais la trouvais un peu chère pour mon budget. Après qu'elle m'ait hantée toute une nuit, je suis partie en catastrophe le matin pour aller la chercher, puis ai foncé jusqu'à l'aéroport en priant pour ne pas rater l'avion. Moralité : la chance sourit aux acheteurs compulsifs (mais est-ce vraiment une morale ?).
Bref, une fois habillée (à nouveau) je bouquine.

19 heures Nous regardons un film en dînant de tartines de chèvre. Ce soir, c'est moi qui choisis le film, et mon choix se porte sur The Secret Garden, adaptation d'un livre qui a bercé mon enfance (tout comme les autres ouvrages de Frances Hodgson Burnett. J'imagine qu'on ne devient pas lolita que par hasard).

Oui, c'est la version japonaise. Pourquoi ? C'est une excellente question.

C'est un joli film. L'histoire est mignonnette, les décors superbes, Maggie Smith joue dedans… Bref, nous avons passé un bon moment, avec plusieurs crises de fou rire après ma magnifique imitation d'un oisillon qui réclame à manger.

21 heures 
Je reçois du courrier, alors j'y réponds.
Je me fais un bracelet.
Manucure avec mon nouveau thé made in Quimper.
Ledit thé. Original, légèrement alcoolisé, mais très bon.

23 heures Bientôt l'heure d'aller dormir… Je me détends en discutant avec des amis sur Facebook, alors que nous regardons l'Équipe du soir, une émission de débats sportifs. A vrai dire, c'est une émission que j'aime bien. J'ai commencé à suivre le sport à la télévision quand j'avais 15 ou 16 ans, il y avait quelque chose qui me grisait quand je regardais le tennis ou l'athlétisme, dans cette idée de dépassement de soi poussée à tel point qu'une poignée d'hommes et de femmes sont capables d'accomplir des performances physiques hors de portée du plus grand nombre. Et puis au-delà de tout aspect plus ou moins intellectuel, ça divertit.
Bon, et une fois l'émission finie, je pars lire un peu avant d'aller dormir.

Bonus, 3 heures du matin Hum. J'ai beau regarder le plafond, je ne parviens pas à trouver le sommeil.

mardi 19 mars 2013

LXXXIV


Innocent world x Mucha dans le dernier GLB.

On est loin de ce qui m'a fait plonger dans le lolita, mais... c'est beau.

dimanche 17 mars 2013

LXXXIII ~ Orientalismes

La Thé Box du mois de mars est simplement parfaite (à une petite exception près, mais passons). Sur le thème de Bollywood, elle propose un grand nombre de thés indiens ou d'inspiration indienne, très épicés et savoureux, dont le fameux thé chai dont je n'arrive plus à me passer depuis deux mois.

Thé Anichaï Dammann, sorte de lassi à la mangue et au pan massala, et un des livres que j'ai achetés au musée d'Orsay
la semaine dernière, histoire de rendre cette soirée un peu mystique. Le thé et le pan massala se trouvaient dans la Box.

J'ai depuis mon enfance une curieuse fascination pour l'Inde ; je dis curieuse parce qu'au fond elle n'est pas basée sur grand chose… Ma mère, ex-baba cool, me parlait souvent de son pèlerinage en Inde, des couleurs, des épices, de la beauté des Indiennes, et, totalement séduite, je jouais en me drapant dans un paréo en guise de sari, tressais sur mon crâne la perruque de Pocahontas que j'avais reçue un Noël (on fait comme on peut, quand on ne dispose que d'un carré blond en guise de chevelure), et ma mère me laissait farfouiller dans son coffret à bijoux après m'avoir dessiné un bindi de rouge à lèvres sur le front.
Bien sûr elle me parlait aussi de la misère, de la mendicité omniprésente, des maladies, mais à 5 ans on fait facilement abstraction de tout ça. En tout cas, je fis facilement abstraction de tout ça (dois-je me sentir coupable ?) pour ne garder que ce qui excitait mon imagination. Avant de tomber sous le charme du Japon, je ne jurais que par l'Inde (pas mal par la Perse aussi, les Mille et Une Nuits se retrouvaient souvent sur ma table de nuit, mais je confondais les deux cultures, enfant…). Mon amour pour le film A Little Princess n'arrangeait rien de tout cela, parce qu'il est vraiment superbe, visuellement.
Pourtant, maintenant que j'y repense, c'est un pays que je connais terriblement mal. Je m'y suis franchement désintéressée, adolescente… mais l'Inde telle que je me la fantasme exerce toujours une certaine attraction sur moi. J'aimerais y voyager, un jour, même si j'ai un peu peur d'être déçue tant je sais que la réalité diffère d'une rêverie enfantine.

Bref, ce chai aura été ma madeleine de Proust, ce soir (et je culpabilise d'utiliser cette expression alors que je n'ai toujours pas lu À la recherche du temps perdu. Blah).

Un peu de musique, pour accompagner le thé, histoire de prolonger la confusion indo-persane de mon enfance (et en plus si la Russie s'en mêle, on ne s'en sort plus !), mais c'est ce que j'écoute en boucle depuis hier, alors…

« Danse des esclaves persanes », in la Khovantchina de Moussorgski.

LXXXII ~ L'Ange du bizarre

Depuis quelques semaines j'ai énormément de mal à me concentrer sur à peu près tout. Comme souvent je prends conscience du nombre de choses qu'il me reste à apprendre alors que je passe huit heures de mes journées à me disputer avec mes collègues sur la place d'une virgule ou le choix d'un mot (je ne dis pas que c'est vain, ni même que c'est inintéressant, mais mon impatience sous-tend une légère dose de mauvaise foi). Ma pile de livres à lire atteint bien le demi-mètre, et j'ai tellement l'impression de n'avoir le temps de rien que j'en ai commencé six à la fois (dont un achevé tout à l'heure en fait, ce qui me soulage déjà un peu). Mon projet de voyage au Japon devient de plus en plus palpable, même si rien ne s'est encore vraiment concrétisé – ce qui finit de m'impatienter tout à fait.

Je crois qu'en fait ma vie rêvée serait d'être étudiante dans deux ou trois domaines différents, tout en ayant un travail qui me donne un salaire suffisamment élevé pour voyager deux mois par an dans des contrées lointaines, ceci en gardant le temps de lire, jouer aux jeux-vidéo, passer du temps avec les gens que j'aime et dormir huit heures par nuit.

~ Mais comme c'est irréalisable, je me contente pour le moment de travailler et de rejoindre mes amies au musée. ~

La dernière exposition que j'ai été voir est donc L'Ange du bizarre, au musée d'Orsay, avec Petite Dieu, Rehem et Aëlin. En attendant les retardataires (dont je ne faisais pas partie, pour une fois) nous avons été jeter un œil à la boutique éphémère de l'exposition, où le choix de livres est tout bonnement hallucinant, et où je pense retourner ne serait-ce que pour en noter toutes les références.

L'exposition en elle-même est une présentation thématique du romantisme noir, embrassant ses origines païennes, religieuses, historiques, mais aussi une présentation chronologique, en axant la fin du parcours sur la récupération des thèmes romantiques par des courants du XXe siècle comme l'expressionnisme ou le surréalisme.

Magritte, Le Colloque sentimental, 1945.

Ce parcours, très complet et assez scolaire, guide à mon sens assez bien le spectateur dans cette galerie des angoisses où regorgent nombre de pièces très connues, comme Le Cauchemar de Füssli, L'Apparition de Moreau ou encore Dante et Virgile aux Enfers de Bouguereau, dont la plupart était difficile d'accès à cause du monde qui s'y agglutinait. J'ai malgré tout pu découvrir quelques tableaux qui m'ont vraiment marquée, comme ceux de Caspar David Friedrich (plus je tâtonne dans le monde de la peinture, plus ma préférence pour les paysages se nettifie).

C. G. Friedrich, Première neige, 1827
C. G. Friedrich, Rivage avec la lune cachée par des nuages, 1836

J'ai pas mal d'affinités avec ce courant, j'imagine que nous avons tous nos angoisses et nos chimères ; pour autant voir autant d'œuvres centrées sur l'ego a fini par m'agacer. Curieusement je garde un souvenir plus tendre pour l'exposition sur la Mélancolie que j'ai vue avec ma classe de terminale au Grand Palais en 2005, alors que les deux touchent des thèmes tout aussi sombres… sans doute parce que la mélancolie n'est pas nécessairement synonyme de suffisance. Ce qui me gêne, dans ce romantisme noir, c'est à la fois un certain manque de subtilité et un pessimisme égotiste. En perdant la foi en Dieu, dans le monde, en achevant de renier l'idéal qui exaltait les premiers romantiques, le romantisme noir finit par ne plus rien voir d'autre que lui-même.


Gabriel von Max, La Femme en blanc, 1900.
Lorsque je parle d'une mélancolie qui n'est pas celle du simple repli sur soi, je ne parle pas de celle qui est maladive, pathologique, mais d'une mélancolie plus « productive », qui favorise la méditation, qui aiguille l'imagination ; celle qui même si elle nous donne conscience du désenchantement du monde nous permet d'avoir des desseins plus nobles que la seule contemplation de notre détresse.
Dans l'absolu, je n'ai rien contre cet enchevêtrement de monstres, de paysages sombres, de visages éthérés,  au contraire, mais il me devient difficilement supportable à si forte dose. Mon esprit ne doit pas être si tourmenté que cela, finalement.

Gustav-Adolf Mossa, Elle, 1905.
Bref, si le beau est toujours bizarre, le bizarre ne se trouve pas que dans les angoisses humaines. D'autant plus que ce qui était bizarre et subversif un siècle et demi avant notre naissance a été depuis tellement sacralisé qu'on pourrait presque en faire la norme de la subversion. Le culte de l'individu, et par extension la fascination pour son mal-être, est devenu l'un des socles de la société moderne, ce qui fait de cette exposition une très belle exposition, très complète… mais aussi très convenue.


L'Ange du bizarre. Le romantisme noir de Goya à Mas Ernst.
Exposition temporaire au musée d'Orsay
Du 5 mars au 9 juin 2013.


(Les tableaux qui figurent dans cette article font partie de mes préférés. Si je me suis découvert une folle passion pour Caspar David Friedrich, en revanche je n'ai pas réussi à trouver d'image qui rende justice au Gouffre d'André Masson, peinture qui m'a purement et simplement coupé le souffle.)

jeudi 14 mars 2013

dimanche 10 mars 2013

LXXXI ~ Tribute to Peace Now & Black Peace Now.

La nouvelle a été annoncée il y a quelques jours : Peace Now Inc Japan est en faillite, et leurs boutiques Peace Now, Black Peace Now, Black Peace Now for Men et Gadget Grow sont en cours de fermeture. Bien que triste, cette annonce ne m'a pas surprise plus que cela avec le tournant qu'a pris la mode gothic & lolita ces dernières années, de moins en moins gothic que lolita. Il me semble que la fermeture de la boutique de San Francisco était déjà révélatrice sur l'avenir sombre de ces marques…

Kera, décembre 2010.  Cette coordination me fait toujours autant d'effet.
Ce collier serait de chez Peace Now. Il me fait beaucoup d'effet également.
Bien qu'ayant nécessairement évolué au fil des ans, j'ai l'impression que PN et BPN sont vraiment restées dans le même esprit que lors de leur création en 2001, avec des pièces sobres mais originales, jouant avec les frontières entre mode gothic et esprit lolita. Peut-être faut-il y voir l'une des causes de leur déclin ?



Je regrette de ne pas avoir pu les soutenir autrement que par mes soupirs admiratifs, mes achats BPN s'étant limités à de la seconde-main. Il y a sans doute une certaine facilité à pleurer l'esthétique d'une marque sans prendre en compte l'aspect vil de sa survie matérielle ; rêverie de l'amoureux des jolies choses qui espère que l'Idéal suffise en tout ! Pour autant, mon chagrin est sincère, tout comme, je pense, celui de beaucoup d'entre nous.



De haut en bas et de gauche à droite Tuonetar, Ludwig, Shimi, Saru, et moi, portant chacun du BPN pour l'occasion. 

J'espère que les designers ainsi que leurs équipes respectives réussiront à se remettre de cette épreuve.
Transparent White Star