jeudi 31 janvier 2013

LXVII ~ Petit Cossette

J'ai enfin terminé Le Portrait de Petit Cossette. Depuis le temps que je voyais la silhouette blonde de Cossette hanter mes Gothic and Lolita Bible...!


Résumons... Le jeune Eiri, étudiant en art, travaille chez son oncle, un antiquaire. L'histoire commence alors qu'il se retrouve peu à peu sous l'emprise d'objets hantés par l'âme torturée d'une toute jeune fille morte au XVIIIe siècle, Cossette, dont il ne cesse de dessiner le portrait. Peu à peu, il en tombe amoureux, jusqu'à accepter de se soumettre à elle, buvant une coupe de son sang, et devenant sa chose contrainte de subir d'inhumaines tortures.
C'est donc un anime d'horreur, baignant dans une modernité pesante de nostalgie et dans un passé magnifié par la beauté de Cossette, liés par un ailleurs malsain, monstrueux, où Cossette est reine et l'amoureux transi esclave. Malgré tout, cet anime n'a pas vraiment pour but de nous effrayer (sinon peut-être de nous mettre mal à l'aise), je le vois plutôt comme une réflexion sur la beauté, le travail de l'artiste, qui se réfléchit dans les dessins eux-mêmes. Petit Cossette est une petite merveille d'animation, où l'ellipse est de mise pour suggérer le déroulement de l'histoire et privilégier une succession de tableaux.
À vrai dire je n'ai pas adoré cet anime, loin de là : je lui reproche beaucoup de longueurs, spécialement sur les scènes de torture. Alors que les scènes de la vie quotidienne sont admirablement traitées, pleines de finesse, de mélancolie, et de splendides jeux d'ombres et de lumière, leurs pendants occultes sont d'une lourdeur qui déséquilibre complètement le tout. Le pauvre Eiri, prêt à tout endurer pour Cossette, se laisse manipuler pendant des minutes qui semblent durer des heures, répétant en permanence qu'il est prêt à souffrir  le martyre pour elle – ce dont on peut se douter alors qu'il passe la moitié des épisodes à se vider de son sang par amour. Je vivais Petit Cossette comme une réelle expérience esthétique ; toute cette atmosphère gorgée de romantisme noir me plongeait dans une torpeur plus qu'agréable, dont je sortais frustrée au bout de quinze minutes d'hémorragie de Eiri. Les trois épisodes durent quarante minutes chacun, et j'en sortais avec un manque, l'impression de ne pas en avoir eu assez, tant ce qui me plaisait était gâché – à mon sens – par l'envie d'en faire trop dans le gore... alors que le reste était si poétique ! Mais peut-être suis-je tout simplement moins sensible à cette esthétique-ci ?

Si j'ai donc été modérément conquise par le parti-pris horrifique de l'anime, un peu trop insistant à mon goût, je suis emballée par toute la réflexion sous-jacente, qui se cristallise dans la volte-face finale (dont je ne  vais décemment pas parler... même si ce qui suit est lié). Cossette périt des mains de l'artiste qui peignit son portrait, et qui ne supportait pas de la voir grandir. Tout changement physique flagrant était pour lui une atteinte à la perfection du tableau (j'aime bien cette idée brodée autour du Portrait de Dorian Gray), et toute flétrissure devait être détruite. Eiri, l'autre peintre de l'histoire, ne jure que par Cossette : le dessin n'est qu'un médium et non une fin en soi. Bien sûr, les deux points de vue s'expriment ici de manière exagérée, mais je trouve cette opposition intéressante : une œuvre peut-elle se suffire à elle-même, ou est-elle nécessairement soumise à l'hommage, à l'inspiration ? Petit Cossette ne se borne certes pas à cette rationalisation, ce serait peut-être même la dénaturer que de vouloir l'y enfermer, mais j'aime bien lorsque derrière l'enchantement des sens se dessine un questionnement qui, même si on n'y apporte pas de réponse, nous aura fait réfléchir et croître, juste un peu. (D'autant que le manga et l'anime ont une réputation de médias débilisants, et que cela me fait plaisir de pouvoir passer un article à développer sur les qualités esthétiques et poétiques de l'un d'entre eux, même si ce n'est pas mon plus grand coup de cœur).
Bref, j'achèterai sans doute la version papier, parce que... voilà (oui, bon).

Une dernière chose, je suis obligée de mentionner la bande-originale, que j'ai acquise juste après avoir vu le premier épisode, car elle m'a vraiment marquée. On peut la trouver sur Youtube ; en attendant, voici mon morceau préféré.

1 commentaire:

  1. J'avais beaucoup aimé ce manga, cela fait d'ailleurs longtemps que je l'ai lu -et que j'ai lu un manga, accessoirement.
    Si doux, délicat et innocent tout en étant sombre et malsain. Bref, une belle oeuvre d'art!

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